vendredi 13 novembre 2020

Les ours mal léchés d'apprivoisent à Noël [Chronique express]


 
Valentine Stergann
Les Editions Hugo & Cie
297 pages 

Synopsis :
Malgré un quotidien bien huilé, Irène a l’impression de passer à côté de son destin. Alors, quand elle apprend que la vieille amie de sa grand-mère lui lègue sa maison en Angleterre, elle n’hésite pas et saute seule dans le premier avion, direction Charlestown. À l’aube des fêtes de fin d’année, elle démarre une nouvelle vie avec de nouveaux voisins : un septuagénaire loufoque, une pétillante serveuse… mais surtout Rudolph, solitaire et bourru, veuf depuis deux ans. Aussi attirant qu’agaçant, cet homme des cavernes se maintient tant bien que mal au-dessus des flots grâce à son fils. Et si l’étincelante Irène réussissait à le faire sourire à nouveau ? Et si c’était ça, la magie de Noël ? Et s’il suffisait de quelques flocons de neige pour réparer les cœurs ?

[CHRONIQUE EXPRESS]

"Les ours mal léchés s'apprivoisent à Noël" est pour le moment la meilleure romance de Noël que j'ai lue en cette année 2020. L'auteure française, Valentine Stergann a réussi à m'émouvoir, tout en me tenant en haleine durant toute la durée du récit.

Ce que j'ai aimé dans cette romance, c'est que les personnages sont tous atypiques mais finalement très "ordinaires".....D'abord, nous avons Irène, notre héroïne, qui nous confie ses pensées, ses doutes, ses joies et ses désillusions (pas forcément dans cet ordre, remarquez...). 

Loin du cliché de la jeune femme pure et innocente qui tombe sur le prince charmant, dans "Les ours mal léchés s'apprivoisent à Noël", nous faisons la connaissance d'une française de 35 ans qui vit en couple depuis 18 ans avec Edouard, son amour de jeunesse. 

On le sait dès le début, leur relation tourne au vinaigre...Il faut dire que notre héroïne se fout une pression pas possible pour tomber enceinte (tic tac tic tac, l'horloge interne de sa fécondité...) et la raison principale est qu'elle se sent coupable car elle a toujours refusé d'avoir des enfants plus tôt avec son compagnon pour privilégier sa carrière de journaliste (qui a tourné au drame puisque elle a finit par faire un burn-out)...Et évidemment, à 35 ans, c'est plus "compliqué" de tomber enceinte qu'à 25 ans....Surtout quand on a un compagnon qui ne remet pas du tout en doute sa virilité et qui part du principe que le problème de fécondité vient (toujours) de la femme...

Dans cette romance, le petit coup de pouce du destin va arriver dans la vie d'Irène par un héritage tombé du ciel d'une petite maison en Angleterre.

Personnellement, j'ai beaucoup apprécié la manière dont l'auteure a introduit son héroïne, ses galères de "femme moderne" qui subit la pression de la société, de son compagnon, du regard des autres etc.

Et bien évidemment, j'ai encore plus adoré la suite, quand Irène débarque à Charlestown, ce petit village anglais, au bord de la mer ! 

Sa nouvelle maison appartenait à Margaret, une ancienne amie de sa mère. Cette anglaise était un peu "excentrique" (c'est comme ça que l'on qualifiait les femmes libres qui voulaient rester célibataires, sans enfants, indépendantes financièrement sans toutefois renoncer aux hommes pour réchauffer leur lit de temps à autre...) et Irène se souvient vaguement d'elle quand elle venait leur rendre visite en France quand elle était enfant...

Une fois arrivée sur place, notre héroïne va d'abord faire la connaissance de Jacob, le vieux voisin anglais excentrique (lui aussi - et c'était un très bon ami de Margaret...) de la maison d'à côté. Puis, elle va rencontrer son autre voisin bougon, ce fameux ours mal léché, Rudolph, qui est vraiment un sale con mal élevé au début du récit. 

Notre bel anglais au caractère de cochon est un londonien qui s'est installé à Charleston il y a maintenant 2 ans, suite au décès de sa femme....Il a un adorable fils, Quincy, 9 ans et demi, qui va vite se prendre d'amitié pour Irène...

Notre jeune femme va donc devoir s'acclimater à cette nouvelle vie (heureusement, elle parle très bien anglais, ça aide !), elle va découvrir peu à peu le passé de ses voisins et je dois dire que j'ai vraiment été happée par le récit et je n'avais qu'une envie : partir vivre à leurs côtés !

Evidemment, dans une romance de Noël, il y a la fête de Noël....Qui va devenir un moment mémorable riche en rebondissements !

Nous avons aussi des personnages secondaires féminins très intéressants qui apportent un peu de peps (et de solidarité féminine pour Irène) mais il y a aussi un personnage détestable au plus haut point dans ce livre...Cela met du piment dans le récit mais apporte aussi une bonne leçon de vie (Un conseil que j'essaye moi aussi de m'appliquer pour mon propre bonheur : s'éloigner des personnes toxiques.....Même s'il est vrai que c'est parfois difficile quand ils font partie de la votre famille ou que vous devez travailler avec eux tous les jours....Mais nos héros y arrivent, eux !...).

Irène, par sa personnalité lumineuse, par son trop plein d'amour à donner (notamment son envie "contrariée" d'être mère), par son altruisme, ses doutes sur son charme (pourtant évident !), va changer -voire chambouler - la vie de ses voisins. 

La petite tornade française a vraiment fait de l'effet dans ce petit village so british !

Les thèmes abordés dans cette romance sont loin d'être frivoles ou "cul-cul la praline", nous avons ici des personnages avec des backgrounds assez lourds voire traumatisants (notamment la gestion du deuil, de la culpabilité, la dépression, le burn-out, l'infertilité...). Et surtout, le message de cette histoire, c'est qu'il faut toujours garder espoir et que la roue tourne et on a tous droit au bonheur et à l'amour ! Que ce soit à  35 ans ou à 70 ans (n'est-ce pas Jacob !).

J'apprécie aussi que l'auteure, Valentine Bergann, fasse revenir son héroïne en France pour "boucler la boucle", notamment vis à vis de l'homme qui aura partagé sa vie durant 18 années et qui méritait mieux comme mise au point (et explications) que la rupture abrupte qu'Irène lui avait fait subir au début du récit (et qui aurait pu nous la faire passer pour une garce, à nous lecteurs, si nous ne suivions pas ses pensées et comprenions donc ses réactions parfois un peu "folles" comme tout plaquer pour aller vivre dans petit village anglais...).

Je vous recommande totalement cette romance, qui se déroule, certes, au moment des fêtes de Noël, mais qui est surtout un livre sur l'espoir, le bonheur et l'amour sous toutes ses formes (amical, filiale ou romantique...Etc). Vous pouvez donc la lire à n'importe quelle période de l'année, son effet "feel good" devrait agir sur vous et vous remonter le moral, je vous le garantie !

Quelques citations :

"– Vous venez de débarquer en Angleterre, vous ne savez même pas conduire à gauche, si ça se trouve… Quincy a un téléphone pour m’appeler en cas de souci, vous auriez dû chercher à me joindre au lieu… Je baisse les yeux, brûlée par le contact de ces deux prunelles émeraude qui me fixent, même si je ne suis pas totalement en tort. Je ne supporte pas de me faire disputer comme une enfant, j’ai passé l’âge des remontrances, mais je conçois qu’il ait été terrorisé. Je me contente donc d’approuver d’un signe de tête, tandis qu’il conclut avec froideur : 
– Ne vous approchez plus de mon fils. Mon voisin agit sous le coup de la colère, toutefois, j’imagine que dès qu’il s’agit de notre enfant, nous nous transformons tous en lion. À travers le rideau de la maison jaune, Quincy me lance un regard désolé. J’aime beaucoup ce gamin, il me touche. Manque de bol, son père me déteste. D’ailleurs, il se retourne sans un mot de plus et rentre chez lui. Alors qu’il s’apprête à disparaître, je prononce quelques paroles qui me paraissent indispensables : 
– Je suis désolée. La main sur la poignée, toujours dos à moi, mon voisin se fige un instant. 
– Vous pouvez l’être, annonce-t-il d’une voix rauque. Il me claque une nouvelle fois la porte au nez. Et je n’ai même pas la force de le traiter de connard".


"Au fil des minutes, Quincy s’interroge sur ma vie en France. Il me demande si j’ai déjà vécu près de la Tour Eiffel – la réponse est non – et si le pain est vraiment aussi délicieux qu’on le dit – oui, bien sûr. 
– Tu as un mari et des enfants ? Ils sont où ? La question est maladroite, mais j’aurais dû m’y attendre. Les gamins n’ont pas de filtre. Bien que Quincy me paraisse très mature pour son âge, il possède la spontanéité et la naïveté de bon nombre d’enfants. Je tâche de ne pas montrer que son interrogation me déstabilise, même s’il m’est difficile de me concentrer sur ma réponse quand je sens le regard perçant de Rudolph sur moi. Je crois que je l’intrigue, d’une certaine manière. Je suis la nana sortie de nulle part qui cause un peu trop de problèmes. 
– J’ai eu un compagnon pendant longtemps, expliqué-je avec sincérité. 
– Ah bon ? Et pourquoi c’est fini, alors ? 
– Quincy ! grogne son père. Je hausse les épaules afin de signifier que ses questions ne me gênent pas. 
– Je crois que parfois, l’amour s’échappe. 
– Et il va où ? Bonne question, Quincy. 
– Je n’en sais rien. Je deviens rouge pivoine tant les iris de Rudolph me mitraillent en cet instant. 
– Tu voudras un enfant avec ton prochain amoureux ? Je rougis, déstabilisée, mais je n’ai pas le temps de répondre que Quincy enchaîne : 
– Ma copine Babeth, sa maman l’a eue tard, mais c’est un peu bizarre une maman vieille, non ? Mes yeux s’écarquillent. Ce gamin réussit à me balancer mes pires angoisses à la figure. Plus jamais je n’entrerai dans cette baraque jaune. 
– Quincy ! s’exclame à nouveau Rudolph. 
– Ben quoi ? C’est Babeth qui le dit. 
– Tais-toi un peu, tu es beaucoup trop curieux, c’est dingue. Ça ne te regarde pas. Quincy grimace et s’attire une œillade noire de son paternel. Comme le gamin ne parle plus, la conversation tourne court. 
– Je pense que je vais rentrer, annoncé-je en lançant un regard vers l’horloge du salon. Dix-sept heures dix-sept. Une très bonne heure pour se carapater". 


"Rudolph me déteste, ne vous emballez pas. 
– C’est toujours comme ça que commencent les histoires d’amour, assure Jacob. Crois-moi, c’est l’expérience qui parle. 
– Ça promet des parties de jambes en l’air du tonnerre, ajoute Zoey. Ces deux-là devraient envisager de se faire soigner, ils ont un pète au casque. Je cache mon visage entre mes mains pour camoufler la gêne qui m’emporte à nouveau. J’aurais mieux fait de rester sur mon canapé avec un bon bouquin. Je ferme les paupières une demi-seconde, et les beaux yeux de Rudolph s’immiscent dans mes pensées. Je secoue vivement la tête pour le chasser. 
– Il n’y a aucune tension sexuelle entre ce type et moi, d’accord ? braillé-je dans le café toujours aussi vide. Je sens une vague de malaise envahir mes interlocuteurs et leur regard dévier derrière mon épaule. Vu les yeux pétillants de malice des deux compères, je redoute qu’il s’agisse de… 
– Irène, puis-je vous parler quelques minutes ? Je reconnais cette voix rauque. Rudolph. Il n’y a qu’à moi que ce genre de choses arrive. Je me retourne en slow motion sous les œillades moqueuses de Jacob et Zoey. Je les déteste. 
– Je… Eh ben, en fait, je suis occupée. La serveuse pousse un cri offusqué tandis que je remballe Rudolph. Mais il croit quoi, celui-là ? Qu’il peut débarquer comme un cheveu sur la soupe avec ses beaux yeux verts et sa barbe de trois jours ? 
– Ne me faites pas regretter d’être venu jusqu’ici pour m’excuser de mon attitude d’hier. Toujours ce ton condescendant qui me hérisse les poils. Comment ce type peut-il être aussi désagréable ? C’est une véritable prouesse, quand on y pense. Jacob me file un coup de pied sous la table. Après tout, Winnie le Grognon a l’air sincère, bien que je commence à en avoir marre de ses changements d’humeur incessants. Je n’ai jamais rencontré quelqu’un d’aussi lunatique que Rudolph Starkey. 
– Quelques minutes, alors… Mon voisin me fait signe de le suivre à l’extérieur du café, alors que Zoey se penche vers moi pour me souffler : 
– C’est bien, fais-toi désirer, ma belle. Ce n’est pas du tout ce que je cherche à faire, bon sang ! Je rejoins Rudolph dehors, emmitouflée dans mon écharpe. Le mois de décembre s’installe, il fait un froid de canard. D’ailleurs, le bout du nez de mon interlocuteur est tout rouge, et je me surprends à trouver ça adorable, même si j’aimerais bien que ma conscience arrête de dire des conneries pareilles".



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