jeudi 11 juillet 2019

LA LUNE COMANCHE


Catherine Anderson
Les Editions J'ai Lu (2019)
Sortie originale 1993
448 pages

Synopsis : 
Sept ans après le meurtre de ses parents, Loretta Simpson vit toujours dans la terreur que les guerriers comanches ne reviennent. Sa peur est si envahissante qu’elle en a perdu la parole. Considéré par l’armée américaine comme son ennemi le plus retors, Loup Noir est convaincu que Loretta est « la femme sans voix aux cheveux de miel » de l’antique prophétie – la femme qu’il doit honorer pour l’éternité. Mais Loretta ne voit en lui que l’ennemi qui l’a enlevée, et elle refuse de se soumettre. Malgré la haine qui oppose leurs deux peuples, Loretta et Hunter dépasseront peu à peu leurs préjugés, et il faudra toute la force de leur amour pour trouver, dans ce chaos, un havre de paix…



Magnifique ! J’ai vraiment adoré cette romance historique qui se déroule dans les années 1860 aux Etats-Unis. A cette époque, nous sommes en pleine guerre de Sécession, mais c’est dans le Far West sauvage et cruel que nous entraîne l’auteure américaine Catherine Anderson. Nous suivons les aventures d’une jeune femme, Loretta, qui vit auprès de sa tante dans une ferme isolée, au milieu des plaines, en compagnie de sa petite cousine, Amy, et de l’affreux Henry qui s’est remarié avec sa tante.

Loretta a été traumatisée quelques années auparavant par le massacre de ses parents (elle a également assisté au viol sauvage de sa mère) ce qui l’a laissée muette depuis tout ce temps-là.

Son destin va croiser un jour celui de Loup noir, un guerrier Comanche, métis (son géniteur est un soldat américain qui a violé sa mère lors d’une attaque de leur tribu). Notre héros nourrit, on peut s’en douter, une haine farouche envers les blancs mais il est aussi à l’écoute des prophéties et des paroles chamaniques et sa mère lui répète depuis son plus jeune âge qu’une jeune femme aux cheveux d’or qui ne parle pas sera un jour sa destinée…..

Ce livre est terriblement romantique de par sa construction narrative et l’évolution des mentalités des différents personnages (notamment notre futur couple) mais il est aussi très choquant car l’auteure ne nous cache rien des massacres perpétués entre les deux camps (et comme vous vous en doutez, c’est souvent les femmes et les enfants qui trinquent….).

Ce livre est plus qu’une romance car il nous fait réfléchir sur les dernières année de « liberté » d’un peuple qui a, depuis, été quasiment annihilé et qui n’a plus son mot à dire dans l’Amérique actuelle….C’est triste…Car la philosophie de vie des peuples amérindiens aurait beaucoup à nous apprendre, notamment en ce qui concerne la connexion avec la Nature…

« Quand ils auront coupé le dernier arbre, pollué le dernier ruisseau, pêché le dernier poisson. Alors ils s'apercevront que l'argent ne se mange pas ».  Citation Amérindienne

Ah oui, ai-je besoin de vous préciser que «La lune Comanche » est un coup de cœur pour moi ?!!!!

Ce que j’ai aimé dans ce livre :

1#-La romance entre Loretta et Loup Noir : Ca n’a pas été le coup de foudre, loin de là ! A la limite on aurait presque pu envisager un syndrome de Stockholm quand Loretta a commencé à s’attacher à Loup Noir….Pour notre héros, il s’est intéressé à la jolie blonde uniquement à cause de la prophétie dont sa mère lui rabâche les oreilles depuis son enfance. Loretta hait les Comanches à cause de ce qu’ils ont fait à ses parents, et Loup Noir hait les blancs à cause de ce qu’ils ont fait à sa mère, mais aussi ce qu’ils continuent de faire à son peuple. Malgré tout, l’amour va triompher, dans la douleur et le sang, certes, mais nos deux héros vont finir par réaliser qu’ils sont des âmes sœurs…..Envers et contre tout et qu’ils devront faire des choix pour continuer à s’aimer….

2#-La dure réalité du Far West : Ames sensibles s’abstenir ! SPOILERS En effet, entre le viol de la jeune Amy, la petite cousine de Loretta, qui n’a que 12 ans, par une bande de mercenaires mexicains, ou les massacres de femmes et d’enfants dans la tribu de Loup Noir ou la ferme voisine de celle de la tante de Loretta, nous sommes servis…..Sans parler de la description des nombreux scalps de visages pâles qui servent de trophées aux Comanches…Ni de la mort de chevaux innocents...En même temps, l’auteure ne relate que la réalité de cette vie extrêmement dure de cette époque, de ces guerres entre ces peuples, entre ces blancs conquérants qui veulent (et volent) les terres, qui mettent des barrières pour délimiter leurs terrains….Des terrains qu’ils ont décrété être à eux…..Je comprends la rage des peuples indiens….Mais c’est une guerre perdue d’avance pour eux….Du coup, dans ce livre, je n’ai jamais été sereine car je m’attendais à chaque page à perdre un personnage (notamment Amy….Bon, après, si je m’étais renseignée, j’aurais vu que l’auteure a écrit une suite à ce roman qui va concerner sa future romance avec le guerrier Cerf-Blanc….

3#-Les diverses intrigues : Les ennemis sont partout et l’histoire d’amour entre Loup Noir et Loretta va poser des problèmes à beaucoup de monde. SPOILERS J’ai adoré la manière dont a été traité le comportement de Bison Rouge, qui voulait absolument la mort de Loretta, et la révélation sur son implication sur le massacre de la mère de la jeune femme, 7 ans auparavant. L’horrible oncle de Loretta, qui a essayé de violer la jeune femme (heureusement que Loup Noir était là, même si, à ce moment-là du récit, il était considéré comme un monstre sanguinaire, aux yeux de la jeune femme….Ce qui a fait palpiter mon cœur de grande romantique !!!!). Les mensonges à propos des comanches, les raisons toutes faites pour que les Tuniques Bleues les massacrent en masse….C’était vraiment un livre très prenant et très stressant par moments !

4#-La différence de mentalité entre les blanc « civilisés » et les Comanches « sauvages » : Mine de rien, l’auteure dénonce énormément de choses dans son livre, en tout premier lieu la condition de la femme à cette époque (mais qui peut aussi se retranscrire n’importe quand et n’importe où dans le monde)….Si le mari de la mère de Loup Noir va l’adopter et le considérer comme son propre fils, et son héritier à la tête de la tribu, sans lui faire porter la faute de son géniteur blanc qui a violé une indienne, ce n’est pas le cas au niveau du comportement des blancs…..Chez les blancs « civilisés » les femmes blanches enlevées par les Indiens finissent comme « perdues et déshonorées » et devraient même trouver le « courage » de se suicider plutôt que de revenir auprès de leur famille (si jamais elles reviennent à la « civilisations »)…..Je trouve cela scandaleux et déplorable, mais malheureusement ce « code d’honneur » est toujours pratiqué à travers le monde, même à notre époque actuelle, même au XXIème siècle (il suffit de voir le nombre de jeunes filles défigurées à l’acide, ou lapidées sur la place publique…). J’ai eu les boules pour Loretta, quand elle arrive à revenir dans la ferme de sa tante et que tout le monde croit qu’elle a été « souillée » par Loup Noir et qu’elle porte son enfant…..Quant au sort d’Amy, un peu plus tard, force est de constater que les guerriers comanches ont beaucoup plus d’humanité et de d’humanisme que les soit-disants « blancs civilisés ». Ce livre fait réfléchir car il met en lumière tous les travers et les horreurs commises par les hommes et cela nous rend d’autant plus mal à l’aise que c’est systématiquement envers les femmes et les enfants et qu’il n’y a personne pour s’offusquer que les victimes ne sont pas à condamner en même temps que leurs bourreaux……Je vous le dis, les peuples Indiens étaient beaucoup plus tolérants et humains à ce niveau-là….Les femmes étaient vraiment beaucoup mieux considérées que les femmes blanches dans la société ultra conservatrice des blancs (cela dit, cela ne choque personne si un oncle veut violer sa nièce dans la grange….Combien d’enfants et de femmes ont subi ce sort dans notre « société moderne et civilisée » ?.....

Quelques citations :

"J’ai une révélation à te faire : tu es le Comanche de la prophétie. Tu es venu à moi du côté où le soleil se lève… des reins d’un Tunique bleue, il y a vingt-six hivers de ça. Il en eut le souffle coupé, comme si elle l’avait frappé. 
— Non ! J’ai souvent posé la question à mon père. Il a toujours répondu que j’étais son fils. Tu mens. Il voulut se relever, mais elle lui agrippa le bras. 
— Non, je ne mens pas. Il y a du bleu dans tes yeux, et tu es plus grand que tes frères. Tu les dépasses d’une tête. De sa main libre, elle prit le pendentif qu’il avait au cou, le tourna pour montrer l’image gravée dans la pierre. 
— Tu portes le signe du loup, pourtant personne ne t’appelle chef. Il la dévisagea longuement, dans un silence glacial. 
— Toi… la mère que j’aime… et un Tunique bleue ? 
— Je n’ai rien fait de mal. C’est arrivé pendant une attaque, semblable à celle d’aujourd’hui. Les hommes étaient partis à la chasse. J’ai tenté de fuir, mais le Tunique bleue m’a vue. Il m’a violée, poursuivit-elle d’une voix sourde, et laissée pour morte. Quand j’ai compris que j’étais grosse, ton père a déclaré que l’enfant était de lui, et nous nous sommes unis devant le feu sacré. 
— Pourquoi me racontes-tu cela ? Pour que je ne venge pas ma femme ? rétorqua-t-il d’un ton rageur en lui arrachant le pendentif des doigts. Je la vengerai, il le faut. 
— Retrouve ses assassins, oui, mais ne prends pas part au bain de sang que veulent les autres, implora-t-elle, les larmes aux yeux. Ta vie ne t’appartient pas. Le sort de ton peuple repose sur tes épaules. Tu dois trouver la femme sans voix aux cheveux de miel, tu dois nous l’amener et l’honorer. 
— Une mort rapide, ce sera ma façon de l’honorer. 
— Ne prononce pas ces mots, car ce qui est dit doit être, soupira-t-elle. Elle se releva et, les mains sur les hanches, contempla l’horizon. Puis elle effleura la tête de son fils. 
— Je ne te demanderai pas d’arracher la haine de ton cœur, car la haine est annoncée dans la prophétie. Quant à l’amour, il jaillit comme la source des entrailles de la terre, il ne se commande pas. Mais pour le salut des tiens, mon fils, tu dois trouver la femme aux cheveux de miel et nous l’amener. Les mâchoires crispées, il demeura silencieux. 
— C’est difficile, je le sais. C’est justement pour cela que tu as été choisi, parce que tu es fort. Le Peuple suivra un jour prochain la voie du vent. Le Grand Esprit t’a désigné pour chanter notre mémoire et garder nos traditions vivantes. 
— Je suis un guerrier, pas un conteur. 
— Il y a bien des manières de combattre, répliqua-t-elle avec un sourire triste. Le guerrier le plus brave de tous est celui qui n’a pas de bouclier. Les tiens ont besoin de toi pour livrer l’ultime combat, la plus amère bataille. Et tu dois le faire seul. Quand l’heure viendra, tu verras le chemin que le Grand Esprit a tracé pour toi et tu le suivras avec courage. 
— Le Comanche de la prophétie doit quitter le Peuple. Jamais je ne ferai une chose pareille, surtout pas avec une femme blanche. Je crois que tu ne mesures pas la profondeur de ma haine. 
— J’ai moi aussi des raisons de haïr les tosi tivo. Le Tunique bleue est toujours là, dans mes mauvais rêves. Mais j’ai porté dans mon ventre un petit tosi tivo, je lui ai donné le sein et je l’ai appelé fils. Mon amour pour lui scintille comme l’étoile la plus brillante du ciel. Tu es ce petit tosi tivo. Que tu le veuilles ou non, il y a une part de toi qui n’est pas comanche".


"Tom Weaver se raidit. 
— Bon sang de bois, grommela-t-il. Henry, tu sais qui c’est ? 
— J’espérais me tromper. Loretta plissa les yeux. Un frisson la parcourut. Loup Noir. Elle en avait entendu des histoires à son sujet, à faire dresser les cheveux sur la tête. Mais jusqu’ici, elle n’avait pas cru à l’existence de ce personnage. Un métis aux yeux bleus, l’un des ennemis les plus rusés, les plus perfides, de l’armée américaine. La guerre avait dressé le Nord contre le Sud, et la cavalerie ne pouvait plus protéger les colons contre Loup Noir et ses maraudeurs. Ces pillards s’aventuraient de plus en plus loin sur les terres habitées en direction de l’est. Certains prétendaient que Loup Noir était beaucoup plus dangereux qu’un véritable Comanche parce qu’il avait l’intelligence d’un Blanc. On disait toutefois que, quoique féroce, il épargnait les femmes et les enfants. Était-ce la vérité ou une fable inventée par un défenseur des Indiens ? Nul ne le savait avec certitude. Loretta, en tout cas, priait que ce soit vrai. Car les Indiens n’étaient que des assassins, des bêtes sauvages".


"— Prends cette main, Cheveux de Miel. En signe d’amitié. Elle avait peur qu’il ne l’empoigne et ne la soulève de terre, mais il était difficile de résister à son regard impérieux. Du reste, s’il était résolu à l’enlever, il le ferait. Tremblante, elle posa sa main dans la sienne. Les doigts calleux se refermèrent sur les siens, leur chaleur se répandit dans tout son bras. 
— Nous nous retrouverons. Je viendrai à toi comme le vent. Souviens-toi du visage du Comanche. Je suis ta destinée. Sur ses mots, il la lâcha et fit tourner son étalon tout autour de la cour. Le bras levé, la tête rejetée en arrière, il poussa un cri strident qui fit frémir Loretta. L’instant d’après, les chevaux s’éloignaient dans un nuage de poussière et un bruit de tonnerre".


"La semaine dernière, après qu’on est tombées sur ces Indiens au bord du fleuve, j’ai entendu maman discuter avec Mme Bartlett. Elles disaient que c’était normal, pour une honnête femme enlevée par les Comanches, d’aspirer à la « délivrance ». Qu’est-ce que ça signifie ? C’est la mort ? Loretta faillit mentir, puis se força à acquiescer. La vie était rude dans ce pays et, malgré son jeune âge, Amy devait savoir certaines choses. 
— Si les Comanches viennent te chercher… tu te tueras ? demanda-t-elle d’une voix tremblante. Loretta hocha de nouveau la tête, contente pour une fois d’être muette. 
— Je sais qu’ils ont été horribles avec ta mère. Maman n’a pas voulu m’expliquer, mais j’ai bien compris. Et toi, tu as tout vu. C’est pour ça que tu as des cauchemars. Amy s’interrompit, pensive. 
— Je me demande pourquoi ils sont si abominables. Comment ils réagiraient si on leur faisait la même chose ? Loretta ferma les yeux, épouvantée. Jamais des hommes blancs n’infligeraient des supplices aussi affreux aux Indiens. C’était toute la différence entre des humains et des bêtes féroces. L’image de Loup Noir surgit dans son esprit. Son visage buriné, ses yeux bleu foncé. Une peur atroce lui broya le cœur".


"Il soupira. Et lui, où était passée sa colère ? Sa haine ? Il ne savait trop quand c’était arrivé, ni comment, mais la petite femme frêle qui dormait près de lui n’était plus sa captive. C’était lui maintenant qui était son prisonnier".
 



2 commentaires:

  1. Salut.
    Que penses-tu du personnage de Bison Rouge?

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  2. Hello, j'en pense que c'est un personnage intéressant et qu'il aurait mérité un livre à son sujet ;-)

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