lundi 27 juin 2022

LES QUATRE CAVALIERS - Tome 4 : Mort [Chronique express]

Laura Thalassa
Les Editions Collection Infinity (2022)
Sortie originale 2021
594 pages
 
Synopsis :
Il est la Mort en personne ; elle est le seul être sur lequel il n’a aucune emprise. Le jour où Mort arrive dans la ville de Lazarus Gaumond et anéantit toute la population d’un seul coup, il ne s’attend pas à voir une femme encore vivante. Or, Lazarus a elle aussi un don extraordinaire : elle ne peut être tuée, ni par les humains, ni par les éléments, ni par Mort lui-même. Elle est la seule âme que Mort ne reconnaît pas. La seule qu’il ne peut libérer de sa chair. Et il ne peut pas non plus ignorer l’attirance troublante qu’il éprouve pour elle. La prendre. Il le veut, désespérément. Et plus elle essaie de l’arrêter dans sa folie meurtrière, plus ce désir s’amplifie. Lorsque Lazarus croise le chemin des trois autres Cavaliers, d’une situation inconcevable naît un marché désespéré : séduire Mort, sauver le monde. Une tâche ardue s’il en est, d’autant plus qu’elle est en froid avec Thanatos. Mais l’attirance que Mort éprouve pour elle est indéniable, et malgré tous ses efforts, Lazarus ne peut se défaire de cet être ancien et magnifique et de sa sombre étreinte. La fin est arrivée. L’humanité est destinée à périr, et même les Cavaliers ne peuvent empêcher Mort d’accomplir son dessein ultime. Seule Lazarus en est capable.

[CHRONIQUE EXPRESS]

Génial ! tout simplement génial ! Cela fait des mois que j'attendais ce dernier tome des Quatre Cavaliers (de l'Apocalypse) concernant le dernier et plus "énigmatique" cavalier = Mort. 
En effet, contrairement à ses trois autres frères, Mort, alias "Thanatos", est le moins "humain", déjà par son apparence : il possède des ailes, des ailes noires. 
Son simple contact fait décéder tout être vivant donc, évidemment, les humains restent un grand mystère pour lui (bon, concrètement, il a aussi le pouvoir de maintenir les humains en vie, mais à priori, ça ne l'intéresse pas....) et surtout, il a vu ses frères succomber tour à tour pour une femme et renoncer (pour Guerre et Pestilence) à leur immortalité.....Et lui, estime être "supérieur" à ses frères et il doit mener sa mission divine à sa fin......
Si le précédent tome, concernant "Famine" nous avait conduit au Brésil, pour l'ultime opus, nous voici aux USA.....
D'ailleurs, c'est assez judicieux de la part de l'auteure, Laura Thalassa, car le premier cavalier (Pestilence) était apparu au Canada et avait commencé à "envahir" les Etats-Unis.....C'était il y a 26 ans.....Et les parents de l'héroïne actuelle, ont été victime de ce premier cavalier.....Si Lazarus a survécu, c'était pour une seule raison : Elle ne peut pas mourir !!!! 
Evidemment, le bébé a grandi et la petite fille, puis la jeune femme, a connu le chaos, la civilisation post-apocalyptique dans laquelle vivent les humains depuis l'arrivée consécutive des Cavaliers de l'Apocalypse. Notamment au niveau de la modernité, de l'électricité etc....Les gens se déplacent maintenant essentiellement à vélo ou avec des chevaux....Mais ça, on l'avait bien "intégré" dès le 2ème tome....(après la "sidération" des humains à la fin du 1er tome et la fin de l'électricité, internet et tout le tralala dont nous sommes tous accrocs actuellement....).
Donc, oui, Lazarus est immortelle....Elle a déjà été "tuée" plusieurs fois au cours de sa vie, que ce soit par cause "accidentelle" ou par l'agression des hommes qui sont revenus (pour certains) à l'état sauvage et où existe dans certains endroits la loi du plus fort (et du coup, vous devinez ce qui arrive aux jeunes filles dans ce contexte....).
Néanmoins, quand Lazarus va croiser la route de Thanatos (Mort), elle va évidemment être intriguée et surtout, elle va se donner pour mission de l'arrêter (vu qu'elle est la seule à ne pas mourir à son contact)....
Et c'est principalement par vengeance, car toute sa famille adoptive a été annihilée par Thanatos (les gens meurent carrément "sur place" dès qu'il arrive dans une ville).....
Laura Thalassa a le chic pour nous décrire toute l'horreur des drames que vivent nos héroïnes consécutives, et ici, le drame arrive le jour de l'anniversaire de la petite nièce de Lazarus....La mort d'enfants c'est assez dur à lire.....En même temps, quand on se met à la place de Thanatos, il ne fait que "remplir son rôle" et puis, surtout, les gens qui meurent partent "au Paradis" (on le comprendra plus tard, quand Lazarus exigera que Thanatos "ressuscite" sa mère adoptive et que celle-ci lui demandera de la faire "repartir dans l'au-delà"....).
Evidemment, j'ai été happée par le récit, par le point de vue de Lazarus, sa détermination et sa force de caractère....Mais aussi l'attraction que nos deux héros ont l'un pour l'autre.....Thanatos, qui va vite comprendre que Lazarus est "sa destinée" va se prendre au jeu et va être un vrai stratège pour "provoquer" la jeune femme....Tout en étant, lui-même, totalement "ignorant" du fonctionnement des humains, de leur "mode de pensée" (en tout cas, au niveau de la séduction....).
Ce livre a aussi l'avantage de faire revenir les trois autres cavaliers !
Notamment Pestilence et Guerre, qui ont vieilli, en même temps que leurs épouses....Du coup, Pestilence a maintenant l'apparence d'un homme de la cinquantaine....Et il est aussi le plus humain car il préfère qu'on l'appelle par le prénom humain qu'il s'était choisi à la fin du 1er tome (qui lui était consacré): Victor.
Famine est le seul cavalier qui a gardé son immortalité et du coup, il est aussi le seul à pouvoir s'approcher également de près de Thanatos.....
J'ai beaucoup aimé les interactions entre Lazarus et les trois autres cavaliers qui vont faire d'elle leur alliée.....Car évidemment, eux non plus ne veulent pas que Thanatos "tue" tout le monde, notamment leurs épouses et leurs enfants !
La relation qui va grandir entre Lazarus et Thanatos est très intense ! D'abord, il y a ce jeu du chat et de la souris, et ensuite, il y a cette tension sensuelle entre eux-deux et enfin, il y a le "devoir" du cavalier, qui se sent "investi d'une mission", c'est à dire ne pas échouer (à exterminer les humains), là où ses frères ont abandonné....Quitte à se faire détester par la femme qu'il aime....
J'ai vraiment beaucoup aimé la personnalité de Thanatos, qui est très complexe. On avait eu l'occasion de l'apercevoir dans les précédents tomes puisque c'était toujours à lui que les autres cavaliers demandaient de l'aide (souvent ramener à la vie "leurs compagnes").....Et celui-ci s'exécutait toujours, certes avec curiosité et interrogation....Jusque à ce qu'il tombe, lui aussi, amoureux...
L'auteure américaine, Laura Thalassa, a parfaitement réussi sa saga !!! La fin est impressionnante et émouvante à la fois....
Les personnages secondaires sont aussi très intéressants, notamment ceux que va côtoyer Lazarus et qui vont la pousser à "se battre" pour la vie.....
Evidemment, on ne peut que terminer ce livre en poussant un gros soupir....Voilà, c'est terminé.....Cette saga post-apocalyptique avec des personnages mythiques nous en apprend également aussi énormément beaucoup sur la nature humaine (dans le bien comme dans le mal.....).
L'histoire d'amour entre Lazarus et Thanatos est sublime, intense, belle et tragique à la fois.....La vie et la mort qui s'unissent pour le meilleur et le pire....
J'ai aussi aimé cette ambiance un peu à la "Walking Dead" vu que Thanatos a le pouvoir de faire "revivre" les morts.....
Pour moi, ce livre est un beau coup de coeur ! 
Je l'attendais avec tellement d'impatience, depuis la sortie du 1er tome, et je n'ai vraiment pas été déçue ! 
La conclusion est logique et comporte une certaine "morale".....
Quant à la romance entre Thanatos et Lazarus, cela m'a un peu fait penser au premier tome, avec Thanatos qui est totalement inexpérimenté mais qui va vite comprendre comment "fonctionne" notre héroïne !
Je ne peux que vous conseiller ce livre, mais évidemment, il faut d'abord lire les trois précédents (qui sont tout aussi captivants !)....
J'ai adoré et je ne suis pas contre la relire un jour car franchement, l'auteure a le chic de faire monter la pression, de ne pas cacher la dureté (et l'injustice) de la vie et le comportement parfois très "moyen" de certains êtres humains.....
Car dans cette saga, les Cavaliers de l'Apocalypse ne sont pas forcément les "méchants", et les humains qui meurent ne le sont pas non plus....C'est juste la "loi de Dieu" qui s'applique.....
Je vous recommande cette saga à 100% ! Et j'avoue, après avoir terminé ce dernier opus, j'ai eu du mal à me reporter sur un nouveau livre....Il m'aura fallu faire plusieurs essais avant de trouver un autre livre qui arrive à me "faire passer la pilule", à "faire le deuil" de cette saga !....
C'est à ce genre de sensation que l'on reconnait les lectures "coup de coeur" et franchement, cette saga des quatre Cavaliers de l'Apocalypse (Pestilence, Guerre, Famine et Mort) en est un ! Lisez ces quatre tomes ! Vous ne le regretterez pas ! Et Bravo à l'auteure Laura Thalassa pour son imagination et son audace (il faut quand même oser faire mourir des enfants ou des personnes vulnérables, tout en maintenant une atmosphère de "romantisme" tout au long du récit !).

Quelques citations :
"Tim croise les bras et m’adresse un regard cinglant, même si je ne lui demande qu’une ristourne d’un petit dollar. — Écoutez, soit vous payez plein pot, soit vous allez voi… Pile au milieu de sa phrase, ses yeux se révulsent. — Tim ? Il s’écroule tandis que je l’appelle. — Tim ! Je me précipite, mais je ne suis pas assez rapide. Le doux son que son corps produit en s’étalant sur l’herbe est perdu dans le bruit collectif de beaucoup de grands objets qui tombent tous en même temps. Je sursaute en entendant le vacarme, et les petits cheveux à la base de ma nuque se dressent. C’est à cet instant que je remarque que ce silence inquiétant est toujours là – celui qui avait commencé quand les animaux se sont enfuis. Sauf que, à présent, il est plus prononcé que jamais. Je regarde autour de moi, confuse. Dans toutes les directions, les gens sont à terre, immobiles. La plupart d’entre eux sont étalés sur l’herbe, mais certains sont renversés sur des tables. Personne ne bouge. Une seconde s’écoule, puis deux, puis trois. J’ai conscience de ma propre respiration saccadée et du battement de mon cœur effrayé, et mon esprit essaie de donner du sens à ce que je voix. Le truc, c’est que je sais de quoi il s’agit. Ça semble impossible, et mon cœur refuse de le croire, mais un incident du genre s’est déjà produit. Ça m’est déjà arrivé. Pourtant, je m’agenouille vers la femme qui était en train d’étudier le cageot de maïs de Tim. À présent, ses yeux aveugles sont fixés sur les nuages. Je place une main sur sa gorge, cherchant son pouls. Rien. La nausée me retourne le ventre. Je me relève, balayant du regard les étals du marché une dernière fois, observant les dizaines de corps immobiles. Personne ne bouge. Le doux bruit du vent faisant frémir les auvents en toile me parvient, le bruissement des arbres, et même le glouglou d’un récipient non identifié qui renverse son contenu. Mais il n’y a pas de bavardage, pas de rires, pas de cris, pas de bourdonnement d’insectes et aucun chant d’oiseaux. Tout est complètement silencieux".
"Tout le monde est mort – tout le monde, sauf moi. Un petit son s’échappe de mes lèvres, et je sens mon corps trembler, mais mon esprit est étrangement vide. Est-ce à ça que ressemble le choc ? Je sors du marché en titubant et prends la direction de l’Autoroute 78. Je ne peux réprimer mon horreur grandissante, tandis que je me fraie un chemin parmi les morts. Jusqu’où cette dévastation s’étend-elle ? Je dépasse la dernière rangée d’étals, et la grand-route se trouve pile en face de moi, lorsqu’un bruit de sabots interrompt mes pensées. Il me semble l’imaginer, mais il gagne en intensité. Je me tourne en direction du son. D’abord, je ne discerne rien, l’auvent de l’étal à ma droite me bloquant la vue. Je fais quelques pas supplémentaires vers de la route, et c’est là que je le remarque. Se détachant en contre-jour du soleil matinal, ressemblant à un dieu sombre, se trouve un Cavalier dans une armure argentée avec deux ailes dans le dos. Ces fichues ailes sont tout ce que j’arrive à fixer, pendant un moment. Elles sont aussi incompréhensibles que la mer de cadavres derrière moi. Il y a quatre créatures connues, qui ont le pouvoir de tuer toute vie en un instant. Et seule l’une d’elles possède des ailes. Le dernier ange de Dieu. Mort".
"Temple, Géorgie Juillet, An 26 de l’Ère des Cavaliers   Mes genoux se dérobent pratiquement lorsque je comprends. Mon Dieu. Je suis en train de regarder Mort en personne, un des quatre Cavaliers de l’Apocalypse. Je n’ai jamais vu quiconque – quoi que ce soit – qui lui ressemble. Il est vêtu pour la bataille – même si la question resterait de savoir qui aurait la moindre chance contre lui. Cette armure brille comme si elle était fraîchement polie, et ces immenses ailes noires sont rétractées dans son dos, si larges que leurs pointes touchent pratiquement le sol. Alors que le Cavalier s’avance, il a le regard rivé sur un point au loin. Son visage est solennel et captivant. Je jurerais avoir vu ce sourcil arqué et la forme de son nez auparavant, dans mes rêves. Et j’ai imaginé le contour de ces lèvres, la courbure de ces pommettes et le carré de sa mâchoire dans tous les poèmes tragiques que j’ai lus à la lueur d’une bougie. Il est plus beau que ce que mon esprit ne peut appréhender et plus terrifiant que je n’aurais pu le concevoir. Je dois produire un son, car le Cavalier baisse le regard qu’il portait à l’horizon, ses cheveux noirs bougeant légèrement là où ils frôlent ses épaules. Pendant une seconde parfaite, nos yeux se rencontrent. Ses yeux sont anciens. Même d’aussi loin, je peux y deviner son âge. Cet être a vu plus de l’humanité que je ne pourrais jamais en rêver. Plus il m’observe, plus je sens le poids de toute cette histoire. Il serre la mâchoire, tout en me contemplant, et ma peau me picote tandis qu’il continue son évaluation".
"Tout en moi demande que je la prenne. Tout. Peut-être que c’est parce que je ne peux pas – pas à proprement parler. Son âme s’est attachée à sa chair, et ni mes mains ni mon pouvoir ne peuvent la lui soutirer. Et, malgré tout, le besoin de l’emmener m’anime. C’est tellement étrange, tellement inquiétant, que mes ailes s’étirent, en partie en raison du choc et en partie pour me préparer à m’envoler. Je l’ai senti, dès l’instant où je l’ai vue, et la sensation n’a pas diminué. Je dévisage cette femme, tandis qu’elle écarte les lèvres. — Je… Sa voix s’estompe et sa poitrine se soulève et s’abaisse plus rapidement qu’elle ne devrait. — Je ne sais pas comment répondre à cette question, dit-elle, l’air perdu et peut-être un peu hébété. Je suis frappé par l’intonation de sa voix. Même ça, c’est irrésistible. Tes frères ont eu leurs femmes. Celle-ci est tienne. Prends-la. Je me débats contre ce besoin entêtant. Est-ce que la même chose est arrivée à mes frères ? Est-ce que leurs luttes étaient si… viscérales ? C’est horrible. Je me prépare. Les humains sont impulsifs. Pas les Cavaliers. Et certainement pas moi, Mort. Je ne deviendrai pas comme eux. Je siffle par-dessus mon épaule pour appeler mon cheval, même si je ne parviens pas à détourner le regard de cette femme. J’ignore pourquoi je veux l’observer. Je suis éveillé depuis un an, à présent. Aucun humain n’a jamais attiré ainsi mon attention. Rien que ce fait est déconcertant. Mon étalon arrive à mes côtés. À contrecœur, je quitte la mortelle des yeux et me force à grimper sur ma monture, bataillant contre mes bas instincts, qui me pousseraient à l’attraper par son tee-shirt pour la traîner sur la selle avec moi. Il faut que quelqu’un brûle mon esprit. Pars, m’ordonné-je. Mets autant de distance que tu peux entre elle et toi. Tu as un devoir duquel tu ne dois pas t’écarter. Pourtant, mes yeux retournent se poser sur elle, comme s’ils avaient une volonté propre et ne pouvaient s’empêcher de la contempler. Dans mon dos, mes ailes se déploient et se referment avec agitation, et je fais de mon mieux pour ignorer les sensations étranges qui me parcourent. — Tu ne devrais pas être en vie, lancé-je d’une voix hostile. Avant que la femme ne puisse ajouter quoi que ce soit, je donne un coup dans l’étrier pour faire démarrer mon cheval, et je m’enfuis".
"— Maman ! crié-je. Pas de réponse. Nonnonnonjevousensupplienon. Elle ne peut pas être morte. — Maman ! J’ai l’impression que mon cœur tente de s’échapper de ma cage thoracique. Je cours de pièce en pièce, comme une forcenée, tout en la cherchant. Elle était là quand je suis partie ce matin, déjà en train de préparer la fête d’anniversaire, mais je ne la vois pas. Partie, c’est mieux que morte, tenté-je de me raisonner. Mais ensuite, je jette un coup d’œil par la fenêtre du salon qui donne sur le jardin. D’abord, je n’aperçois que la longue table en bois, qui est déjà apprêtée avec des assiettes, des couverts et des décorations d’anniversaire. Derrière, je remarque le grand chêne sur lequel je m’amusais à grimper étant enfant. Pendant un instant, j’arrive à me faire croire qu’elle a été une exception, elle aussi, comme moi, avant que je ne pose les yeux sur le potager surélevé. Non. Mes jambes me lâchent. — Maman. Ma voix ne semble pas m’appartenir. Elle est trop rauque, trop agonisante. Elle est allongée à côté du potager, quelques herbes sont éparpillées autour d’elle. Je me force à me relever et chancelle en direction de la porte arrière. Je ne sais pas comment je parviens à l’ouvrir, je ne vois plus clairement, tant mes larmes obscurcissent tout. Je ne veux pas croire à cette mort-ci. Cette femme m’a sauvée et accueillie. Elle m’a montré à quoi la grâce, la bravoure, la compassion et l’amour ressemblaient. Pour citer ma composition de deuxième année, ma mère est mon héroïne".
"— Qui es-tu ? demande-t-il. — Tu m’as déjà posé cette question, répliqué-je, le dévisageant avec méfiance, tandis qu’il s’arrête devant moi. Un éclair déchire le ciel au loin, et je vois à nouveau un squelette se superposer sur Mort. Je frissonne devant cette vision macabre. — Ma simple volonté devrait te tuer, dit-il, ignorant ma réponse. Ce n’est pas le cas. Mon toucher devrait arracher ton âme de tes os. Il n’y parvient pas. Il ne reste qu’une option. Ses yeux anciens semblent… tristes. Le Cavalier bouge extrêmement vite. Il m’attrape des deux côtés de la tête et d’un geste rapide… Crac".
"En fait, c’est la seule chose que j’ai été incapable de faire. Ce qui est encore plus étrange, cependant, c’est que je peux ressentir son essence en ce moment. Je n’ai pas l’impression qu’elle m’appartienne. Tous les autres humains sont intimement connectés à moi. Mais j’ai l’impression que cette femme, dès que je ne la vois plus, quitte la surface de la Terre. Je commence à comprendre que ça va me rendre fou. Je penche la tête et soupire. J’ai encore tant d’âmes à livrer. Elle me distrait. Peut-être que, après ce soir, elle me laissera tranquille. Je fronce les sourcils, agacé par cette idée".
"J’ai pris un nombre incommensurable de vies au cours du temps. Les jeunes, les vieux, les forts et les faibles. Je croyais que j’avais tout vu. Ce n’était pas le cas. Je n’avais jamais rencontré de créature prête à mourir, encore et encore, pour son espèce. Même mes frères n’en seraient pas capables. Nous autres, Cavaliers, sommes tous déjà morts plus d’une fois, mais jamais pour rien de plus tangible que notre devoir. Regarder Lazarus affronter des obstacles aussi insurmontables est troublant. Troublant et envoûtant. Je me réjouis de la revoir".
"Thanatos plisse les yeux, puis il baisse les bras. — Tu as commis une erreur, Lazarus, dit-il en faisant un nouveau pas en avant. Tout ce temps, tu as imaginé que c’était toi qui me chassais. N’as-tu jamais envisagé le fait que, peut-être, c’est moi qui avais jeté mon dévolu sur toi ? Que, tout ce temps, j’étais peut-être en train de t’attirer, toi, pour découvrir et apprendre comment tu penses ? Je continue à m’éloigner de lui, mon cœur battant comme un forcené. — Pourquoi crois-tu que je voyage comme je le fais ? demande-t-il. Sillonner ton pays n’est pas plus facile que d’avancer en ligne droite. Mon cœur s’emballe dans ma poitrine. Je me suis souvent posé la question, mais la réponse qu’il me donne maintenant ne me plaît pas. — Mais tu as toujours voyagé comme ça, même avant le début, protesté-je. — J’ai des… besoins contradictoires, kismet. Un autre pas en avant. Je secoue la tête. Ce qu’il suggère est ridicule. — La première fois qu’on s’est vus, tu t’es enfui, insisté-je. Il l’a fait, je le sais. — J’ai fui le désir persistant que j’éprouve pour toi. Un autre pas en avant. Il ressemble à un homme possédé. — Vas-y, me presse-t-il, demande-moi quel est ce désir. Je garde la bouche fermée, mon cœur essayant de sortir de ma poitrine. Il a chamboulé toutes mes hypothèses sur lui. Comme je ne réponds rien, Mort continue. — J’ai voulu te prendre, dès l’instant où j’ai posé les yeux sur toi, dit-il. C’était le premier besoin humain qui avait jamais rivalisé avec mon besoin de tuer. Je recule, tandis qu’il se rapproche lentement de moi. — J’ai pris bien trop de plaisir à nos rencontres pour mon propre bien, ajoute-t-il, mais j’en ai assez de jouer. Il faut que je m’en aille, tout de suite".
"— Comment fais-tu ça ? demandé-je. — J’ai toujours été capable de faire ça, kismet, répond-il. Jusqu’à présent, j’ai simplement choisi de ne pas le faire. Il aurait pu le faire tout ce temps ? Je repense à toutes les fois où je l’ai affronté. Dans combien de villes nous sommes-nous rencontrés, tout en étant entourés de cadavres ? Beaucoup. Beaucoup trop. Il n’avait encore jamais relevé les morts. Thanatos a bel et bien joué avec moi, tout ce temps. Cette prise de conscience me coupe le souffle. Pour la première fois, depuis longtemps, j’ai réellement peur de lui. — Pourquoi ? demandé-je en reculant. Pourquoi faire ça maintenant ? — Parce que tu as été créée pour être mienne. Et il est temps que je te réclame".
"— Tu comptes vraiment rester allongé ici, dans le froid, avec ton aile drapée sur moi, toute la nuit, juste pour me maintenir au chaud ? demandé-je. — Je ne serais pas contre l’idée de rentrer là où il fait probablement plus chaud, mais oui, je… je crois que c’est le cas. Mon cœur bat comme un fou dans ma poitrine. Je pensais que c’était intime avant, quand c’était purement physique. Je me rends maintenant compte que j’utilisais mal ces mots. Parce que, ça, c’est intime. — Je ne sais pas quoi faire de toi, dis-je doucement. — Dors, Lazarus. Tu pourras analyser ça demain matin. Et c’est ce que je fais. Étrangement, je m’endors dans les bras de Mort comme si c’était la chose la plus facile au monde".
— Qui es-tu, bon sang ? demande-t-il. Quelqu’un qui aimerait vraiment, vraiment être ailleurs qu’ici. Je suis littéralement en train de trembler, à la vue de cet homme. Et de sa faux. Peu importe que je ne puisse pas réellement mourir, j’ai peur pour ma vie. Ressaisis-toi, Lazarus. Tu as déjà affronté des Cavaliers. J’inspire pour me calmer les nerfs. — Ça dépend, répliqué-je, forçant ma voix à rester posée. Qui êtes-vous, vous ? Pas qu’il ait besoin d’un badge. C’est plutôt évident. Le Cavalier plisse les yeux. Il s’avance de quelques pas et l’épée qu’il porte à la taille oscille. Je me raidis. Je n’ai pas la moindre idée du genre de relation que ce Cavalier entretient avec Mort. Il y a tellement de raisons qui font qu’il pourrait avoir envie de me faire du mal, et tout en lui – même la manière dont il bouge – crie la violence. Seigneur. J’ai de la peine à accepter qu’il y ait en réalité quatre de ces enfoirés dans les parages. — Es-tu la femme de Mort ? demande-t-il. Je hausse les sourcils. La femme de Mort ? Loin de là. — Je suis sa prisonnière. Je jette un regard par-dessus mon épaule pour lui montrer là où je suis attachée. Il sourit en coin, comme si le terme était mignon".
"— C’est une blague, Famine ? demande le plus vieux des deux, dont les cheveux blonds sont parsemés de mèches grises. Contrairement au Faucheur, il ne porte pas d’armure, pas plus que l’homme à côté de lui. — Super boulot pour localiser Thanatos, dit celui aux cheveux sombres, et je faillis rire. De toute évidence, je ne suis pas la seule à être à l’aise à l’idée de taquiner le Faucheur. Famine s’avance devant moi. — J’ai trouvé encore mieux que notre frère. J’ai trouvé sa compagne".
"Je t’ai pris tes parents, Lazarus, continue Pestilence en soutenant mon regard. Je ne peux pas leur rendre la vie, mais je peux te donner ça. Tu comprends ? Des larmes me piquent les yeux. J’acquiesce, car ma gorge ne fonctionne pas. — Merci… Victor, dis-je d’une voix rauque. Le Cavalier hausse un instant les sourcils, puis il me sourit sincèrement, d’un de ces sourires qui plissent le coin de ses yeux et illuminent son visage tout entier".
"Famine se tourne vers moi, les yeux de marbre. — Lazarus, dit-il doucement. N’oublie pas ta part du marché. Ses mots sont mêlés de menace. — Suce-le, baise-le, fais toutes les merdes qui peuvent exciter mon frère, mais souviens-toi que tout repose sur tes épaules, à présent. Tout".
"Il sourit contre ma bouche, comme s’il récoltait cette petite victoire, également. Je ressens ce sourire jusque dans mes tripes. Mort se penche légèrement, afin de pouvoir passer un bras derrière mes genoux. Un instant plus tard, il m’attrape, pressant mon corps contre le sien. Je ne le vois pas écarter les ailes, mais je sens son étreinte se resserrer contre moi. Puis Thanatos met sa menace de longue date à exécution. Il m’emmène".
"— Lazarus, si tu pouvais voir la vie telle que je la vois, tu saurais que tout va bien, que tout ira bien. La mort est la fin de la souffrance. — La vie est davantage que la souffrance, rétorqué-je, lui criant pratiquement au visage. Pourquoi tu penses qu’on s’y accroche tous si désespérément ? Ses yeux brillent. — Parce que vous ignorez comment sont les choses. Je secoue la tête. — Tu as tort, dis-je. Mais qu’est-ce que j’en sais ? Je n’ai jamais été morte. Ma mère semblait le préférer. Peut-être qu’il a raison. Peut-être que je me bats pour le mauvais côté depuis le début. C’est la possibilité la plus effrayante de toutes".


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