mercredi 2 juin 2021

SANS FOI NI LOI [Chronique express]

P
atricia Potter
Les Editions J'ai Lu (2021)
Sortie originale 1992
384 pages

Synopsis :
Il était une fois, dans un village du Colorado, une jeune institutrice fière et courageuse...Dans son ranch, Velma a recueilli une bande de jeunes orphelins, une ancienne prostituée et un vieil ivrogne ! Une famille hétéroclite, sa seule famille. Or, le propriétaire décide de récupérer son bien et n'hésite pas à engager un tueur professionnel. Froid, implacable et sans scrupule, Lobo est l'homme idéal. Sa mission : effrayer la jeune femme et la faire déguerpir. De l'argent vite gagné pour ce mercenaire. Jusqu'à ce qu'il tombe nez à nez avec la jolie Velma. Un visage angélique, un corps à se damner, une allure provocante et rebelle. Comme si elle le mettait au défi... Au défi d'accomplir sa mission honteuse, au défi de la désirer, de l'aimer.

[CHRONIQUE EXPRESS]

J'aime beaucoup les romances qui se déroulent dans l'univers de la conquête de l'Ouest. Généralement, ces histoires d'amour sont moins "mielleuses" que celles qui ont lieu à la même époque en Angleterre....(période que j'affectionne également tout particulièrement avec ses Ducs et ses Ladies....).

Dans le monde du Western, la vie côtoie la mort. Les gens sont durs et courageux. Il y a les massacres des peuples améridiens, leurs luttes, les massacres des pionniers blancs qui se font scalper en retour.....Bref, c'est la lutte du plus fort.

ll y a aussi les chercheurs d'or....Et les chasseurs de primes, les pistolleros qui "tuent pour de l'argent"....Notre héros masculin fait partie de cette catégorie.

Surnommé "Lobo" (Loup en espagnol), il a été kidnappé par une tribu Apache quand il était enfant et a vu ses parents se faire massacrer et son petit frère se faire abandonner dans le désert quand il s'appelait encore "Jess".....Pour les Apaches, il va devenir le petit "esclave" d'une vieille indienne qui hait profondément les blancs (qui ont tué son fils et son mari).....Jess/Lobo, va grandir à ses côté, ou plutôt finir "enchainé" à ses côtés car dès le départ elle va lui mettre une corde à collet autour du cou......

Le petit garçon blond aux yeux bleus va devoir se battre pour sa survie.....Il va faire taire tout sentiments, toute humanité en lui. Il va devoir tuer pour rester en vie.

Il retrouvera le "monde des blancs" quand à l'adolescence sa "tribu d'adoption" va se faire massacrer....Les soldats vont le laisser en vie en raison de ses cheveux blonds et de ses yeux bleus qui ne mentent pas sur ses origines d'enfant de "pionniers".

Jess est mort quand son petit frère est mort dans le désert. Maintenant, c'est Lobo....Maintenant, il va devoir ré-apprendre à vivre dans le monde des blancs....Il n'a jamais appris à lire et écrire mais il est d'une grande intelligence et surtout, il est très rapide quand il a une arme à feu dans les mains.

Tout l'Ouest a entendu parler de ce "pistollero", de ce Lobo, qui a une réputation qui fait frémir les plus courageux....Seulement, de par son historique avec les Apaches, les gens s'attendent à voir un brun à la peau bronzée....Pas ce grand blond au regard de glace......L'effet de surprise passé, Lobo a déjà tué ses "proies".....Et du coup, les a priori à propos de son apparence lui permettent finalement un certain anonymat.

Un jour, il va accepter le contrat d'un homme qui lui demande de "faire peur" à une jeune femme qui a hérité d'un terrain qu'il considère comme lui revenant de droit.

Seulement voilà, cette jeune femme n'est pas n'importe qui.....Velma est l'institutrice du village. Débarquant de Boston (comme Dr Quinn, pour les connaisseurs....), son coeur est immense, sa gentillesse sans bornes et surtout elle sait voir le meilleur chez tous les êtres humains qu'elle croise.

A 25 ans, elle n'a jamais voulu se marier, malgré sa beauté.....Elle a adopté plusieurs enfants, des petits orphelins qui ont connu des drames dans leur vie et elle a aussi "recueilli" un "vieux" sheriff alcoolique et une jeune prostituée qui a été éborgnée et salement blessée par l'un de ses clients.....

Lobo va croiser la route de Velma avec pour mission de la faire partir de son terrain et finalement il va se retrouver à devenir son "ange gardien", son héros.....Il va gagner l'admiration, l'amour de ce petit groupe hétéroclite.

Car malgré des abords très froid et impitoyables, Lobo est un homme qui n'a jamais attaqué de femmes ou d'enfants, bien au contraire......

Alors est-ce que je vous recommande cette lecture ? Bien entendu ! Même si c'est une romance qui a été écrite dans les années 90 (et donc il y a moins de scènes osées que dans les romances historiques actuelles....).

Je suis tombée sous le charme de cette belle histoire d'amour entre la jeune institutrice et ce tueur impitoyable....

Et concernant les personnages secondaires, notamment Sullivan, le médecin, ou Marisa, la jolie fille du village, leurs interventions sont intéressantes et nous avons donc le plaisir de suivre plusieurs "romances" en parallèle avec celle de nos deux personnages principaux.

Les "méchants" sont aussi très intéressants....Il y a un vrai background dans les conflits et la haine qui animent les uns et les autres.

J'ai passé un très bon moment de lecture au Far West auprès de Lobo et Velma et je termine mon livre avec un sentiment de plénitude (j'aime quand les histoires se terminent bien, quand les héros qui ont souffert toute leur vie arrivent enfin à trouver le bonheur...). Il va falloir que je me penche un peu plus sur les autres livres qu'a écrit Patricia Potter, qui semble avoir une prédilection sur les histoires qui se déroulent à l'époque de la conquête de l'Ouest....

Quelques citations :

"Lobo était grand, mince, mais très musclé. Des cheveux couleur de sable retombaient sur un front haut, faisant ressortir l'éclat glacial des yeux bleu-vert intense. Le nez était droit et bien proportionné, le menton volontaire. Alex supposa que, malgré sa froideur, certains devaient le trouver séduisant. Il n'y avait aucun signe de sang indien chez lui. Pourtant, on disait qu'il avait longtemps vécu parmi les Apaches. Alex avait déjà vu des Indiens captifs, et remarqué l'impassibilité qu'ils affichaient envers le monde extérieur. Lobo arborait cette même indifférence hostile et cette même arrogance. Il était évident qu'il se fichait pas mal de ce qu'Alex ou quiconque pouvait penser".

"Lobo n'eut pas à attendre longtemps avant de voir une carriole approcher. Une femme mince en tenait les rênes. Deux jeunes garçons l'accompagnaient. Il fut surpris de constater qu'elle ne portait pas de bonnet pour se protéger le visage. Elle avait la peau légèrement hâlée par le soleil et des mèches de cheveux auburn flottaient autour d'elle, échappées de son ruban bleu. Soudain elle sourit aux garçons, avant de rejeter la tête en arrière et d'éclater de rire. Un souffle de vent brûlant porta le son de ce rire jusqu'à Lobo. Il n'avait jamais rien entendu de pareil. C'était doux comme une pluie de printemps. Les mains de Lobo se crispèrent sur la bride, et il fit reculer sa monture lentement parmi les hautes herbes à bisons. Il n'avait pas vu ses yeux. Ils devaient être bleus, à en juger par la couleur de ses cheveux. Elle menait son attelage avec savoir-faire, et son corps était droit et fier. Le chariot disparut derrière un virage et Lobo ne bougea pas. Le rire de la femme résonnait encore dans ses oreilles. Une impression de beauté se gravait dans son esprit. Son cœur battait comme jamais. Quelque chose venait enfin de le toucher. Mais il savait que c'était quelque chose qu'il n'aurait jamais".

"Elle tremblait encore de l'avoir touché. Il avait les épaules larges, le torse puissant et couvert de petits poils blonds. Un corps parfait en dehors de ces terribles cicatrices, probablement des coups de couteau. Elle avait eu mal en les voyant, tout comme elle avait eu mal quand elle l'avait fait souffrir pour le soigner. Ce corps semblait receler tant de force. Et tant de souffrance. Si les cicatrices physiques étaient visibles, il savait parfaitement dissimuler les blessures morales. Elle s'en était rendu compte à sa colère, à son hésitation à accepter son aide. Velma avait souvent rencontré des animaux ou des gens blessés. Elle les avait toujours soignés. Elle avait rassuré des enfants effrayés. Elle savait qu'il fallait du temps pour retrouver leur confiance. Autrefois, Chad se montrait aussi méfiant que cet homme. Elle avait lentement gagné sa confiance. Elle y arriverait aussi pour cet inconnu. Dès le premier regard, elle avait su qu'il ne fallait pas le brusquer. Car il reviendrait. De cela aussi, elle était certaine".

"Des mains douces s'emparèrent des siennes pour les plonger dans l'eau. Des doigts fins séparèrent délicatement le cuir brûlé de sa chair. Elle le lava avec précaution, avec tendresse, avant de le masser avec l'onguent. Quand elle eut terminé, ses lèvres tremblaient et des larmes brillaient dans ses yeux. Émerveillé, Lobo était prêt à croire qu'elle souffrait plus que lui".

"Tu es si belle, répéta-t-il. Velma perçut la tristesse dans sa voix. De nouveau, il était seul et cette solitude le rendait fragile. Alors, elle dit ce qu'elle n'avait pas osé dire jusqu'à présent, de peur de le gêner : — Je t'aime. Il ne répondit pas. Il ne partit pas comme elle l'avait craint. Au lieu de cela, il se pétrifia, et dans son regard elle lut une tristesse infinie, déchirante. Il ferma les yeux, barrant ainsi la route à ses émotions. — C'est la pire chose que tu puisses faire, déclarat-il finalement. — Je crois que c'est la meilleure, au contraire. Elle se pencha pour embrasser ses lèvres. Quand elle s'écarta, il voulut parler mais elle posa un doigt sur sa bouche. — Je ne demande rien, reprit-elle. Je ne te demande pas de rester, même si c'est ce que je désire. Je ne te demande aucune promesse. Je veux simplement être avec toi un petit moment. Il aurait voulu dire quelque chose, mais seul un son étranglé lui échappa. Alors, elle se serra contre lui, lui offrant sa présence, se rassasiant de la sienne. Ils restèrent ainsi, immobiles, durant de longues minutes. Lobo savait que désormais il mesurerait le reste de sa vie à l'aune de cet instant, de cet après-midi. Les minutes qu'il venait de vivre, qu'il était en train de vivre justifiaient toutes les autres".



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